Jean, une figure mythique de Grenoble, dont les acteurs associatifs, syndicalistes, militants, parlent souvent, m’a proposé une rencontre chez lui, à la Villeneuve. C’est un homme de 98 ans qui m’ouvre la porte avec un sourire, sincère, heureux.
Chez lui, dans son petit salon, il m’offre un café dans une une tasse en porcelaine qui me rappelle celles de ma grand-mère.
Jean est, pour moi, une figure grenobloise incontournable et marquante.
D’une formation catholique au séminaire proche de prêtres-ouvriers il est devenu une figure du syndicalisme et du parti communiste – député, adjoint au maire – sa vie est marquée par un infatigable militantisme, que l’on retrouve encore aujourd’hui dans son combat à France Alzheimer.
Il n’y a pas de place pour la nostalgie chez Jean, il ne donne pas de leçons, il raconte son histoire et celles de ses compagnons de route, un récit qui résonne comme une invitation à poursuivre, à prolonger les combats pour la ville. “Il reste tant à faire…” me dit-il.
Nous parlons de l’utopie, celle qu’il perçoit comme un moteur. Pour lui, c’est elle qui fait marcher le monde ; c’est dans ces perspectives lointaines et désirables qu’il faut insérer le projet municipal car « la politique, elle, doit se faire au plus près des habitants, dans les quartiers, là où la vie réelle se déroule ».
Jean a beaucoup à partager sur les quartiers populaires et son travail sur la pauvreté. Il écrit, aujourd’hui encore, un rapport sur la précarité dans lequel il défend inlassablement l’importance du dialogue et du collectif, pour lui « Il n’y a pas d’engagement sans lien aux autres ».
Notre discussion nous amène à son mandat dans l’opposition, en particulier sous le second mandat d’Alain Carignon (1989-94) : il évoque la dégradation des conditions de vie des habitants des quartiers populaires, et le désastre de la privatisation de l’eau.
Et puis, nous parlons de la mobilisation, de la communication et de ses outils; il a un avis bien tranché et me donne des conseils comme celui de faire des vidéos :-).
Figure symbolique et inspirante, il s’efforce de transmettre pour que vive cette mémoire militante grenobloise, une forme d’appel à ne pas lâcher, à s’engager collectivement pour les habitants, à lutter contre les injustices.
Une rencontre marquante.
Laurence Ruffin
Retrouver l’histoire de Jean, Itinéraire d’un militant, l’Harmattan, 2013, son livre autobiographique.